(Courriels de diversion: <recourberait@ambitionneraient-irritent.com> <respections@chagrinerez-tempêteront.com> <badigeonnages@scandaleusement-frauderais.com> <spongieux@recuits-epargnants.com> <enervements@irreparables-bisexuee.com> <byzantine@souffrirais-enfantins.com> <transcrivons@radicale-socialiste-lesterai.com> <redoreront@redemptrice-accelerations.com> <demarrerent@tapiriez-aneantira.com> <hissiez@chlorures-niez.com> )



Ci-dessous le corpus délicti de mon ressentiment, 
un texte de "Daniel Picouly" que je n'avais nul droit de copier de la
largeur d'une langue.

Peut-être en le lisant aurez-vous envie de le découvrir dans son
contexte, 
agrémenté d'illustrations de Pef.
Peut-être voudrez-vous le lire à vos enfants.

Mais peut-être que l'éditeur "La maison aux histoires" ou l'auteur lui
même m'en voudront.
peut-être argueront-ils qu'en dévoilant le texte intégral du livre j'ai
induis
"Un manque à gagner aux ayant-droits".

Ils auraient raison, et je pourrais être condamné.

Quoi que l'avenir nous réserve, voici ce texte que j'ai eu plaisir à
découvrir, et lire à mes filles, et maintenant à partager.

A+
CPHIL

P.S. : Je ne signe pas avec gpg pour pouvoir prendre le maquis au cas où
;-)

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ON LIT TROP DANS CE PAYS !

Il était une fois un pays où on lisait trop.
Trop de tout, sur tout et surtout :
trop de livres, grands, petits, minces, épais,
à images ou sans.
D'ici, d'ailleurs, de nulle part, de partout.
Des avalanches de livres, des cyclones, des tornades
et de grands champs apaisés avec un cerisier au milieu
et une jolie ombre bleue pour s'y allonger.
Dans ce pays, on lisait comme on cueille des cerises.
Juste en tendant la main.

C'était le pays de Rose Bibly.
On ne savait pas pourquoi on le nommait ainsi
mais il portait bien son nom.
Dans ce pays, on lisait trop de tout mais surtout
trop d'histoires avec des moulins à vent,
des baleines blanches, des Zazies,
des Prince petit, qui vous font les rêves
et les matins en grand.

Dans ce pays, 
on lisait trop de tout
mais surtout :
trop de livres qui riment sans façon
avec des voyelles de toutes les couleurs,
des paroles
dans les prés
tout verts
qui vous jettent
le monde 
à l'envers.

Dans ce pays, on lisait trop
de tout mais surtout :
trop d'images qui bullent en bandes organisées,
qui vous font le coeur tout nickelé,
et vous mettent une houpette sur la tête.

Dans ce pays, on lisait trop de tout,
mais surtout : trop de livres à penser
avec des points d'interrogation
comme des ballons
pour s'envoler en montgolfière.

Et ça, ça suffit !
Un jour, triste jour,
est arrivé un chevalier
en armure clinquante.
Un chevalier tout gris. Gris argent.
Gris souris. Gris soucis.
Il allait au pas de son cheval pie.
qui faisait un drôle de bruit...
Taka-clinc ! Taka-clinc !
Taka-clinc !

De son heaume à tirelire et plumes de paon,
une voie s'est élevée en phrases tarabiscotées.
- Mon maître, le seigneur de Trop-C-Trop,
est en fort grand courroux contre vous.
En sa tour, il dit : "Le pays de Rose Bibly
est devenue pétaudière. On y rit, on y pleure,
on devient critiqueur. On y songe même
à penser et pourquoi pas à rêver !"
Et tout ça sans bourse délier, ne laissant
à mon maître que guignes,
queues de cerises
et noyaux rognés.

Alors, mon maître a dit :
"D'or et d'avant,
pour cueillir au verger,
pièces rondes il faudra
faire sonner...
Taka-clinc !
Taka-clinc !"

Il y eut grand brouhaha
au pays de Rose Bibly.
On pensa chercher fourches,
faux et porte-plumes pour asticoter
au derrière ce chevalier à la triste lune.
Mais un jeune garçon se leva. Un enfant du pays.
Un gavroche à poil de carotte,
paille aux cheveux, cerises aux oreilles.
Barbouillé de sourire à la bouche
et vétu d'un paletot rouge à mille poches :
- Hola ! Chevalier Tire-l'hire, quel seigneur
t'a piqué pour nous parler
pire qu'à des voleurs ?

L'enfant s'approcha encore du chevalier.
- N'as-tu donc jamais tendu les mains
dans le verger ? Jamais grapillé
aux branches ? Jamais croqué
Moby Dick, Croc-Blanc,
le Roman de Renard ?
Jamais chaussé sur la mer
ou sous la terre des bottes
de 20 000 lieux ou celles du Chat botté ?
- Jamais ! Jamais. Jamais,
avoua le chavalier penaud.
- Alors, regarde !

D'une des mille poches de son paletot rouge,
le garçon fit apparaître un livre.
Ni plus grand. Ni plus gros. Ni plus beau.
Un livre. Un simple livre.
Mais dès qu'il l'ouvrit, de ses pages s'échappèrent
les ailes d'un Il-était-une-fois.
Aussitôt, dans un tourbillon,
le garçon se transforma en loup à barbe bleue,
en renard à queue de sirène ...
... en poucet géant ...

... et aussi en lampe d'Ali Baba,
en caverne de Simbad, en chaperon à boucles d'or.
Et que sais-je encore ?
Toute l'assemblée fut prise dans l'incroyable tourbillon.
Le chevalier résista. Mais guère.
À son tour, il accepta un livre tendu par le garçon et,
aussitôt, fut emporté jusqu'au coeur du verger.

On ne sait s'il devint marin ou capitaine,
prince, valet, montagne ou rivière lointaine.
On dit seulement qu'il quitta son armure
pour un paletot cerise et qu'il raconte alentour
des livres à sa guise.
On le dit heureux.

Si un jour, par malheur, vous entendez
dans votre dos... Taka-clinc ! Taka-clinc !...
C'est que le seigneur de Trop-C-Trop aura trouvé
un autre chevalier gris à damner.
Prêtez-lui un livre. Ni plus grand. Ni plus gros.
Ni plus beau. Un livre. Un simple livre.
Votre livre.
C'est la meilleure façon de protéger le verger.
Au pays de Rose Bibly,
les cerises sont si belles cette année.



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